Dans le cadre de notre format “Parole d’Université”, nous sommes allés à la rencontre de Guillaume Gellé, président de l’Université de Reims Champagne Ardenne (l’URCA) et président de France Universités. Les liens étroits de l’URCA avec son territoire, sa double casquette de président de l’URCA et de France Universités, son regard sur les écoles privées dans l’ESR… Nous avons pu aborder avec lui de nombreux sujets liés à l’Université qu’il préside et à l’Enseignement supérieur dans son ensemble. 

À découvrir, en lien avec cet article : retrouve l’intégralité de notre échange avec Guillaume Gellé, Président de l’URCA, sur notre chaîne #Thotis Talks (VIDÉO) !

Enseignant-chercheur, président de la faculté des sciences exactes puis vice-président de l’URCA, Guillaume Gellé est aujourd’hui à la tête de l’université depuis son élection comme président en 2022. Également président de France Universités, il a accepté de revenir sur son parcours professionnel, ses missions au cœur de l’Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA) et sur les grands axes stratégiques de l’établissement. Guillaume Gellé nous accueille ainsi dans la bibliothèque universitaire de l’Université de Reims Champagne Ardenne, à l’occasion du tournage vidéo de “Parole d’Université”. Il a répondu à toutes nos questions : 

Guillaume Gellé : son parcours et ses missions de président d’Université

Quel est votre parcours, en quelques mots ?

Je suis professeur des universités en traitement du signal. De 2007 à 2012, j’étais vice-président du CEVU (Conseil des études et de la vie universitaire) de l’université, en charge de la politique de formation, de la vie étudiante et des relations internationales. Je suis depuis mars 2016, président de l’université Reims Champagne-Ardenne et depuis décembre 2022, président de France Universités.

Quelle est votre vision de l’université de demain ?

Une université dynamique ancrée sur son territoire et actrice de celui-ci avec une véritable dimension internationale. Une université inventive à l’écoute de ses étudiants et qui tend vers l’excellence, et pour l’URCA, une université leader académique de la bioéconomie à l’échelle européenne, moteur de l’innovation, qui participe à faire des étudiants des citoyens éclairés.

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L’URCA hier, aujourd’hui et demain 

Pouvez-vous représenter rapidement l’université ?

L’Université de Reims Champagne-Ardenne est une université pluridisciplinaire de formation et de recherche qui compte 28000 étudiants répartis sur 5 villes (Reims, Châlons, Charleville, Troyes et Chaumont). L’URCA propose des formations attractives, du B.U.T au doctorat, qui répondent aux besoins socio-économiques actuels et futurs et qui amènent l’étudiant au meilleur niveau de formation. L’URCA compte également 32 équipes de recherche labellisées dont 4 CNRS, 1 INSERM, 2 INRAE (1 UMR, 1 USC), 1 INERIS, 1 CEA , 4 écoles doctorales et de nombreuses plateformes technologiques. Elle génère 20 000 emplois directs et indirect et 818M€ d’impact.

Notre projet stratégique (formation, recherche et innovation) est positionné autour de quatre pôles scientifiques d’applications centrés sur des priorités régionales, nationales et européenne qui sont la bioéconomie et l’environnement.

Quels sont les axes différenciants de cette université ?

Une université ancrée dans son territoire

L’URCA est un acteur majeur du développement du territoire. Elle contribue à l’innovation sur le territoire et participe la compétitivité du tissu économique local. Son implantation sur 5 sites contribue également au développement du territoire champardennais. Les formations de l’URCA sont conçues en relation avec les milieux professionnels du territoire. L’université affiche ainsi d’excellents taux d’insertion professionnelle (+ de 92% en master soit 2 points de plus que le niveau national). Aussi, son projet stratégique tourné vers la bioéconomie et l’environnement s’inscrit pleinement vers les politiques menées aux plans local et régional.

Une identité affirmée : l’URCA, leader académique dans le domaine de la bioéconomie et de l’environnement

L’URCA est positionnée et reconnue au national comme à l’international dans le domaine de la bioéconomie. Depuis 2016, la bioéconomie constitue une signature identitaire pour l’URCA. Cette thématique est au cœur de son projet d’établissement et du projet de site qu’elle pilote. La mise en place de la bioéconomie influence par ailleurs directement la qualité de l’environnement et l’ensemble de l’organisation socio-économique. Ces domaines s’inscrivent pleinement dans les objectifs de développement durable et les politiques menées aux plans local, régional, national et européen, pour répondre à̀ des enjeux sociétaux majeurs.

En juillet 2022, l’université a été lauréate d’un financement Excellences « Excellence sous toutes ses formes », dans le cadre du Plan d’Investissement d’Avenir avec son projet EXEBIO « Excellence en bioéconomie durable ». Cette réussite reconnait l’excellence en recherche, formation et innovation de l’URCA dans son domaine signature : la bioéconomie et l’environnement.

D’autres pôles stratégiques : la Santé l’IA, les Sciences Humaines et Sociales…

Le pôle santé de l’URCA constitue une composante majeure de notre université (plus de 6 000 étudiants). Il regroupe l’ensemble des filières de santé : médecine, pharmacie, odontologie, kinésithérapie, maïeutique, IPA. En constante évolution le pôle santé se structure autour de projet innovant (Institut d’Intelligence Artificielle pour la Santé, plateformes de simulation (P4P, ophtalmologie), 2 micro-environnements territoriaux santé dans le cadre de DeMETeRE, 2 CMA (compétences et métiers d’avenir) santé numérique : Fo6Med et PROMESS.

Aujourd’hui la MSHS regroupe les 10 unités de recherche de sciences humaines et sociales de l’URCA, une unité de recherche de l’UTT, l’ESAD, Y Schools, Neoma BS et Sciences Po. Au total, ce sont près de 300 chercheurs fédérés autour des thématiques « mutation, transition, transformations ».

Quelles sont les valeurs qui caractérisent votre université ?

Nos valeurs sont multiples. Nous portons les valeurs de citoyenneté et de solidarité. L’université a pour premier rôle de lutter contre les inégalités sociales et scolaires en facilitant l’accès au savoir. L’URCA propose une offre de formation diversifiée à travers toute la Champagne-Ardenne en prenant en compte les spécificités de chaque étudiant et en offrant les mêmes chances de réussite pour tous. En formant ses étudiants, l’URCA forme les cadres, les salariés, les créateurs d’entreprises, les médecins, les chercheurs, mais surtout les citoyens de demain. Garant des valeurs de l’université et de la République, l’URCA lutte contre les discriminations de toutes sortes. Ces valeurs de solidarité se traduisent également à l’international au Benin notamment où nous sommes acteurs de Sèmècity.

L’université est attachée à son rôle social et sociétal. Elle mène à ce titre une politique globale en matière de responsabilité sociétale et de développement durable. Par celle-ci, elle déploie une politique de responsabilité sociétale (laïcité, VSS, handicap, égalité homme/femme,…) ; intègre les problématiques du développement durable et de la responsabilité sociétale au sein des programmes de formation ; promeut une recherche interdisciplinaire, développe une politique à la fois en faveur de la biodiversité, de la réduction des atteintes à l’environnement ainsi que de la diminution des gaz à effet de serre et de la réduction de la consommation des ressources.

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Pouvez-vous évoquer les grands chantiers de l’université ?

En 2023, l’université a vu plusieurs projets structurants être retenus dans le cadre d’appels à projets ou lancés: Exebio lauréat d’Excellences, Innorem comme Pôle universitaire d’innovation (en phase d’amorçage pour le moment), Demetere labellisé Demoes (Démonstrateurs numériques dans l’enseignement supérieur), ou encore plusieurs AMI (Appel à manifestation d’intérêt) CMA (Compétences et métiers d’avenir), en santé numérique notamment. Ou encore l’inscription dans l’alliance européenne INVEST. Quant à 2024, ce sera l’année du nouveau contrat d’établissement et de la future offre de formation, en cours de finalisation.

C’est aussi une refonte de nos campus avec la construction de nouveaux bâtiments : « En dix ans, notre université aura investi 160 M€ sur l’immobilier universitaire, sachant qu’elle n’a pas bénéficié du plan campus »

Que proposez-vous sur l’accompagnement des étudiants (pédagogique, vie étudiante, financement des études, coût de la vie, etc.) ?

L’URCA a mis en place différents dispositifs visant à favoriser la réussite universitaire et professionnelle de l’ensemble de ses étudiants. D’un accompagnement dans les démarches administratives à l’élaboration de leur projet professionnel, sous forme d’aide pécuniaire ou matérielle, dans le cadre de situations personnelles particulières (handicap, etc.), ces dispositifs peuvent concerner des étudiants individuellement, des groupes d’étudiants ou des associations, par des aides directes ou indirectes. Ces dispositifs se sont multipliés ces dernières années grâce aux politiques publiques d’incitation (loi ORE, politiques ministérielles, etc.) ou à la politique volontariste de l’URCA en la matière. Cela se traduit concrètement par une meilleure réussite des étudiants dans leur cursus universitaire.

– Un accompagnement à la réussite : 

Le dispositif « accueil des nouveaux étudiants » porté par le service de la transition lycée-université aide les néo-bacheliers entrant à l’URCA à s’approprier l’environnement universitaire, à opérer les ajustements nécessaires à une transition réussie entre le lycée et l’université, à briser l’anonymat sur les campus et à susciter identification et affiliation à l’université. Le dispositif d’accueil des nouveaux étudiants s’articule autour de 5 actions : webinaires d’accueil, interventions du service de la transition lycée-université en réunion de pré-rentrée, opération boussole, stands d’accueil et visites de campus

– Un accompagnement à la vie étudiante : 

La vie étudiante de qualité et les conditions d’études agréables participent à la réussite des étudiants dans leurs cursus universitaires. La stratégie mise en place par l’URCA à travers ses services en lien avec ses partenaires prend en compte les actions directes et indirectes à l’épanouissement et la réussite des étudiants en matière d’accueil, d’accompagnement, de bourses, de logement, de restauration, de prévention, d’accès au soin, d’égalité des chances…

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Le classement Thotis des universités françaises en 2023

3 300K€ alloués dont 1 710K€ de contribution de vie étudiante et de campus (CVEC).

513K€ sont ainsi dédiés au financement de projets portés par les associations étudiantes (via le FSDIE) et aux actions sociales à destination des étudiants. En terme de lutte contre la précarité étudiante, l’URCA mène une politique active de lutte contre les formes diverses de précarité qui fragilisent le quotidien des étudiants. Plusieurs dispositifs ont ainsi été mis en place :

–  Un dispositif santé : Consultations auprès du SUMPPS (assistantes sociales, consultations psychologiques, écoute VSS)

–  Des actions sociales : soutien financier à l’AGORAé (lieu regroupant une épicerie sociale étudiante et un lieu de vie et d’échange), prêt d’ordinateurs portables, emplois étudiants, distribution de kit d’hygiène à destination des étudiants les plus précaires.

–  Un dispositif contre la précarité menstruelle : distributeurs de protections périodiques gratuites, distribution de 5 000 culottes menstruelles

–  Un dispositif Handicap : Mise en place d’ACCEO : Accessibilité des services aux étudiants sourds ou malentendants par téléphone ou en présentiel.

–  Un dispositif Transport : Mise en place de la plateforme Karos pour le covoiturage.

 

L’Université de Reims Champagne Ardenne dans le paysage de l’ESR : 

En tant que président d’université, comment voyez-vous l’évolution de l’enseignement supérieur ? (nouvelles modalités pédagogiques, etc.) 

Plusieurs axes peuvent être soulignés :

– Adaptation aux besoins de la société 

– Flexibilité dans les modalités d’enseignement

– Renforcement des domaines contribuant au progrès scientifique et technologique et à la souveraineté économique

– L’intégration des avancées technologiques (IA, réalité virtuelle,)

– Un meilleur accompagnement des étudiant et une réduction des inégalités en matière d’accès et de réussite.

– Collaboration et partenariats renforcés notamment avec le monde socio-économique

– Une réponse aux enjeux sociétaux

– Une plus grande agilité

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PASS & LAS (ex-PACES) : la première année de santé

Comment l’URCA a accueilli toutes les récentes réformes : BUT, LSPS (ex PACES), Parcoursup et Mon Master ?

En peu de temps, l’université a su répondre aux défis des nouvelles réformes :

– Le BUT,  Bachelor Universitaire de Technologie, vise à garantir un parcours de 3 ans plus structuré pour les étudiants en proposant une approche plus intégrée que celle du DUT suivi de la licence professionnelle. Les compétences requises sur les trois années sont désormais clairement définies, en équilibrant les enseignements, les périodes de projets et de stages. Les programmes ont pour objectif de créer une synergie entre les expériences d’apprentissage et d’évaluation, ainsi que les ressources pédagogiques, tout en conservant une certaine tradition dans leur conception.> A l’URCA les BUT proposés rencontrent un grand succès.

– LSPS a permis un plus large accès aux études de santé. Elle a permis de diversifier les profils et d’éviter les écueils. Elle a permis une plus grande flexibilité et l’acquisition de compétences transversales.

– Mon Master : Ce nouveau système a permis une vision nationale de l’offre et a réduit le nombre d’étudiants sans proposition. Ce calendrier unique a simplifié les démarches: l’objectif du ministère était « d’optimiser l’attribution des places, fluidifier les démarches et permettre une meilleure visibilité des places vacantes au sein des universités »

Concernant les études de santé MMOPK, vous avez fait le choix d’une seule voie, une LSPS avec 10 parcours, pourquoi ?

Ce choix s’explique de plusieurs manières : 

– La volonté de simplification des choix des lycéens sur Parcoursup

Nous ne voulions pas créer de confusion supplémentaire entre Pass et Las. De plus, le nom « Pass », proche de l’ancien nom « Paces » faisait penser qu’il s’agissait de la même chose.

– Le choix de l’URCA de proposer en première année un équilibre entre la partie « Santé » et la partie « disciplinaire » (parcours):

La répartition est donc de 50/50, quels que soient les parcours. Nous voulions ainsi une structuration simple et claire pour les lycéens, tout en ayant un équilibre et les fondamentaux permettant les poursuites d’études (licence ou Santé). Suivant les universités, la répartition de la part Santé peut varier de 16% à 84%, surtout entre les Pass et les Las, ce qui complexifie une nouvelle fois leur choix.

La création à la rentrée 2024 d’un parcours complet (L1-L3) de Licence Sciences pour la santé (parcours Sciences appliquées à la santé), en complément des autres parcours (psychologie, staps, EG…). Ce parcours de formation mènera vers les métiers autour de la santé (master Sciences du médicament et des produits de santé, ou autre master en lien avec la santé) pour les étudiants qui n’auront pas réussi à accéder aux études de santé.

Les parcours proposés étant : Droit (Reims) / Droit (Troyes) / Psychologie (Reims) / Economie et gestion (Reims) / Economie et gestion (Troyes) / Sciences sanitaires et sociales (Reims) / STAPS (Reims) / Sciences de l’éducation (Châlons en Champagne) / Sciences pour l’ingénieur (Charleville-Mézières) / Sciences (Reims).

Comment s’est déroulée la première procédure « Mon Master » dans votre université ?

Plutôt bien, nous avons eu cette année un peu plus de candidatures en master. Nous avions pu croire à des augmentations massives, notamment sur les filières en tension (psychologie, sciences économiques, etc.), mais les ordres de grandeur sont finalement assez équivalents. L’URCA a proposé 2 398 places de master sur la plateforme.

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(Les questions qui vont suivre s’adressent au président de France Universités plutôt qu’au président de l’URCA)

Des présidents d’université demandent une allocation d’études pour tous les étudiants, quelle est votre position ?

On note une augmentation du nombre de formations privées, parfois sans visa ou grade, quelle est votre position sur ce phénomène ? 

Il est nécessaire de réguler l’enseignement supérieur privé à but lucratif. Cela doit notamment passer par la clarification de la dénomination des établissements et des diplômes, mais aussi par un moratoire sur la délivrance des visas et des grades.

Mettez-vous tous les établissements privés dans le même panier ? 

Non, nous sommes d’ailleurs partenaires dans le cadre du réseau ESRCA de plusieurs établissements privés

On vous a vu plutôt « combatif » à l’Assemblée Nationale pour évoquer le budget et la santé financière des universités, l’état doit-il faire davantage ? 

Oui, l’État doit assumer les mesures qu’il décide, au lieu d’en faire peser la charge financière sur nos universités. Si on veut convertir notre industrie en industrie verte, si on veut réindustrialiser nos territoires, les universités jouent un rôle central. L’enseignement supérieur et la recherche sont un investissement pour l’avenir de notre pays. Ils ne doivent pas être une variable d’ajustement.

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