Johann Bourgoin est étudiant à ICN Business School. Il a effectué son stage au Viêt Nam, dans une filiale du Groupe Elithis à Hanoi et revient sur sa belle expérience en Asie.
Pourquoi avoir souhaité faire ton stage au Viêt Nam ?
Je suis parti 6 mois en stage au Viêt Nam dans le domaine du business development et aide au management pour le Groupe Elithis qui a une filiale (Elithis Asia) à Hanoi.
Le Groupe Elithis est un bureau de conseils en ingénierie du bâtiment qui développe des concepts d’habitats « biotope » à énergie positive. Pour exemple illustratif : la Tour Elithis Danube à Strasbourg produit plus d’énergie qu’elle n’en consomme ce qui permet aux habitants de n’avoir à payer aucune facture d’énergie et même de gagner de l’argent par la revente d’électricité d’origine photovoltaïque, ainsi que par une prime récompensant les comportements vertueux coachés et évalués par une intelligence artificielle nommée Alad’Hun le génie de l’efficacité énergétique ! Ce sont ces concepts à la croisée du « green » et du « smart building » que je devais développer et vendre sur le marché d’Asie du Sud-Est.
Le Vietnam n’était d’ailleurs pas parmi ma checklist des voyages à réaliser. C’est une destination que je n’ai pas choisie en soi (et qui m’a agréablement surprise !) car ce que je recherchais avant tout c’était une aventure humaine via une mission ancrée « business » dans un pays en développement et bien sûr pour les valeurs qui me tiennent à cœur et que le Groupe Elithis porte. J’ai exprimé ces trois désirs au PDG du Groupe qui par chance matchaient avec ses besoins pour sa filiale asiatique. Le Groupe Elithis a justement besoin d’explorateurs qui font vœu de dépasser les limites des possibles.
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Peux-tu nous présenter le déroulé de ton voyage ?
A vrai dire ce n’était pas vraiment un voyage puisque j’allais en stage au Vietnam mais ma mission m’a conduit à voyager (professionnellement parlant) à travers tout le pays en quête d’alliés, partenaires et projets pour développer le marché du « green building » : de l’Est d’Hanoi au port commercial et industriel d’Hai Phong, jusqu’à l’extrême Sud du pays à Saigon la ville des affaires à l’occidentale, en passant par le Centre du Vietnam à Da Nang hub culturel et touristique.
Durant mes week-ends au Vietnam, j’ai bien sûr pu explorer en paddle la beauté des fragiles écosystèmes des îlots karstiques de la Baie d’Ha Long, les mêmes montagnes karstiques que j’ai pu retrouver sur terre à Ninh Binh, l’île tropicale de Cat Ba, les rizières montagneuses de Sapa au plus au sommet de l’Indochine, les plages de sable blanc à Da Nang et le temple des atlantes au sanctuaire de My Son en plein milieu de la jungle non loin de Da Nang, les petites villes et villages où nous invitaient nos collègues dans les campagnes du Nord, les différents temples et musées d’Hanoi nous transmettant ce que j’aime appeler « L’Esprit Vietnamien » etc…
A mi-parcours dans l’obligation de sortir du territoire pour renouveler mon VISA, j’ai aussi pris deux jours pour explorer le site mythique d’Angkor Vat en plein cœur de la jungle du Cambodge.
Enfin, à l’issue de mon stage je me suis réservé une semaine de libre avant de retourner en France, afin d’effectuer 3 jours de découverte et volontariat au Laos dans un centre qui récupère les éléphants captifs et les accompagne vers leur autonomie dans le but de les relâcher ensuite dans la réserve naturelle nationale.
As-tu vécu un choc culturel ?
J’ai vécu deux chocs culturels dans le temps.
Pour commencer, le premier choc a eu lieu lorsque je suis arrivé le premier jour avec un décalage horaire important (les premiers jours je dormais la journée et restais éveillé la nuit car six heures nous séparent de France : quand il est minuit à Hanoi il est 18h à Paris). C’est la première fois que je quittais l’Europe et tout était si différent. Lorsque je me baladais dans les rues de mon quartier et au-delà, je faisais face à une désorganisation urbaine et humaine impressionnante !
Je marchais tantôt dans des déchets (certains étaient en feu) tantôt au milieu des affaires des vendeurs étendues sur le trottoir, parfois c’était des vietnamiens qui jouaient à un jeu de société, buvaient un thé ou fumaient un bang sur une table posée là avec improvisation, ici une vieille femme qui coupait la tête d’un poulet encore vivant à côté de moi (je me vois encore sursauter à cet instant), là une autre qui faisait sa vaisselle dans des bassines à même le sol non loin des bouches d’égouts qui dégueulent de déchets en tout genre, ou encore quelques coiffeurs de rue, quand ce ne sont pas des scooters à éviter qui montent sur le trottoir et slaloment avec aisance entre tous ces gens sans accident. La rue est un véritable lieu de vie et de mélange incroyable !
Ajoutez à cela un mix de bruits déstabilisants entre klaxons intempestifs, musique à fond et hurlements des vietnamiens qui ont l’habitude de parler très fort, plus un condensé de senteurs totalement antinomiques entre la puanteur des déchets, l’odeur de nourriture grillée et la douceur des encens bouddhistes…et là…vous obtenez un cocktail capable de vous faire perdre vos sens ! J’ai totalement perdu mes repères !
Le second choc culturel est arrivé bien plus tard, à mi-parcours, tout juste après la phase de découverte émerveillée. C’est souvent le moment de la prise de recul où on repense à son pays, la douce France, et la comparaison avec le Vietnam devient alors inévitable : je prends conscience du laxisme et du manque de respect envers la Nature et la Vie au Vietnam, plus particulièrement dans la gestion des déchets.
Au Vietnam un déchet a plusieurs options de fin de vie :
– Soit il est directement brûlé dans la rue, acidifiant l’air et les eaux de pluie.
– Soit il est jeté à l’eau pour rejoindre l’océan.
– Soit il est entassé / enterré avec ses congénères en pleine nature polluant ainsi les terres et les nappes phréatiques.
Deux exemples sont criants pour notre génération Instagram :
– La magnifique Baie d’Halong est parsemée d’objets plastiques en tout genre.
– Les plaines des rizières sont souvent encadrées par des collines artificielles de déchets.
A mon tour de vous poser une question : seriez-vous capable de montrer cette réalité à vos followers ou bien feriez-vous un montage photo pour leur cacher cette horreur faisant croire que vous vivez dans un paysage de rêve ?
Ce qui t’a étonné culturellement lors de ton stage au Viêt Nam ?
– La quasi-absence de conscience écologique
– Le culte d’Ho Chi Minh, libérateur du Vietnam
– La place de la famille dans la société vietnamienne primant sur le travail (un vietnamien peut quitter son poste à n’importe quel moment de la journée, à partir du moment où un de ses aïeux lui demande de l’aide aussi infime soit-elle).
Trois choses qui t’ont surprises au Viêt Nam ?
– La circulation rythmée par les vagues de scooters
– La gentillesse désintéressée des vietnamiens.
– La facilité à communiquer même lorsque l’on a aucune langue en commun.
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Ce qui te restera à tout jamais ?
L’alchimie et l’esprit de famille que nous partagions dans l’équipe franco-vietnamienne avec laquelle j’ai travaillé et aussi vécu sur nos temps libres. Aussi, j’ai bien aimé les missions de mon stage au Viêt Nam.
Une belle rencontre ?
A peine arrivé, à l’issue de ma première semaine de travail, un collègue vietnamien que je connaissais à peine et qui ne parlait ni français ni anglais, me fait comprendre qu’il m’invite dans sa famille pour le Têt, la semaine de fête du Nouvel An vietnamien. Nous avons ainsi appris à communiquer et faire connaissance, partager des us et coutumes, le tout dans une langue inventée par nous-mêmes : le vietnamo-franglish !
Mon hôte s’appelle Tuan. Il fût à la fois mon guide et mon meilleur ami, il m’a fait découvrir sa terre natale, sa famille et ses amis, leurs traditions et leur gentillesse. Et maintenant que je suis considéré comme un membre de la famille, il est aussi mon frère vietnamien.
Quels conseils donnerais-tu aux étudiants qui souhaitent réaliser un stage au Viêt Nam ?
Partez seul(e) et évitez les occidentaux ! Vous devez à tout prix vous détacher de l’influence occidentale pour pouvoir vous immerger dans la culture locale et vous intégrer dans la société vietnamienne. A l’issue de votre voyage, vous devez devenir un être hybride, un humain composé des meilleures facettes des civilisations européenne et asiatique !
Aussi, j’ai remarqué une chose : lorsqu’on voyage seul, les personnes sur votre chemin viennent plus facilement vers vous annonçant l’aube de rencontres et d’aventures inoubliables ! En contre-exemple, j’ai vu mes colocataires anglais à Hanoi accumuler les beuveries à la maison et les sorties entre anglais dans des bars anglais, avec peu de respect pour la tranquillité de nos voisins. Ils n’ont finalement rien appris de l’esprit vietnamien.
Quelques fois ce type de sortie est sympa et réconfortant, mais si c’est pour faire cela tous les jours je vous conseille plutôt de rester au pays ce sera moins cher pour vous. Cela dit, je suis sûr que celles et ceux qui me lisent en cet instant sont d’intrépides explorateurs(trices) !
Avant un stage au Viêt Nam, quelles sont les démarches administratives ?
Pour trouver un logement, j’ai intégré les groupes Facebook des étrangers / français au Vietnam / à Hanoi. La toile est remplie de groupes de ce type où foisonnent des offres de logement.
Pour obtenir les papiers, je devais avoir un passeport puis faire valider un VISA. Le VISA a été géré par le cabinet d’avocats vietnamien d’Elithis Asia : je recevais en retour une invitation qui me permettait d’obtenir à la douane de l’aéroport d’Hanoi un VISA de 3 mois, sous couvert de régler 50 dollars et fournir une photo d’identité . Pour mon stage de 6 mois, je devais renouveler le VISA au bout de 3 mois donc, en passant de nouveau la douane c’est-à-dire en effectuant un voyage de 2 jours dans un pays frontalier puis revenir.
Concernant les vaccins, je n’ai rien à vous recommander si ce n’est de consulter votre médecin traitant 6 mois à l’avance car il peut y avoir plusieurs vaccins à faire espacés de 2 à 3 semaines.
BONUS :
– Pensez à louer un scooter pour plusieurs mois (hélas pas la peine de penser aux transports en commun pour vos trajets quotidiens, ces derniers se retrouvant souvent coincés dans la circulation) ou un vélo mais ce peut être dangereux.
– Pour manger moins cher et local, on se retrouve tous dans les petits restaurants de rue (1 à 3 euros par repas).
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Ce que tu as appris sur le pays ?
Le Vietnam est un pays de résistants qui a beaucoup souffert à travers les âges. C’est un pays qui a toujours connu la guerre pendant des siècles mais qui en est toujours sorti victorieux. Les grandes puissances s’y sont toutes cassées les dents : la Chine, la France, le Japon, l’Angleterre, les Etats-Unis… Au premier abord, on peut être trompé par le sourire et la tranquillité des vietnamiens ainsi que par la simplicité de leurs installations, ce qui peut nous conduire à les sous-estimer. Ceci cache une intelligence tactique des plus brillantes.
Leur secret ? Leur force réside en trois points :
– Prendre en compte l’environnement dans lequel on évolue
– Prendre en compte tous les fibres de la société et répondre à leurs besoins
– Leur amour de la Patrie.
La Nature, l’Humain et l’Esprit de groupe sont en effet trois éléments que nous autres occidentaux avons fini par écarter de l’équation dominée à l’inverse par la Rationalité et la Technologie. Ces premiers éléments sont pourtant décisifs pour vous faire perdre ou gagner la partie. Une leçon qui est valable en stratégie militaire comme en stratégie d’entreprise ou en stratégie (géo)politique… Une leçon qui concerne grandement les futur(e)s « global decision makers » comme mes camarades et moi sortant innocemment d’école de commerce…
Un dernier mot ?
Chào !
(Salutations en vietnamien populaire !)