Étudiante en médecine à Clermont-Ferrand, Emma a accepté de répondre à nos questions sur l’organisation des partiels. Elle nous fait part de son inquiétude face à la volonté de l’Université Clermont Auvergne de maintenir des partiels en présentiel malgré l’incertitude sur l’évolution de l’épidémie du Covid-19 dans les prochaines semaines. Pour conserver l’anonymat de l’étudiante, le prénom initial a été modifié.

Thotis

« On nous certifie que les mesures barrières seront appliquées, mais en nous disant d’ores et déjà qu’aucun masque ne sera à notre disposition et qu’on doit se les fournir de nous-même. Des surveillants vont devoir distribuer nos copies, vérifier nos identités avec nos cartes, nous changeons de place à chaque épreuve, et plusieurs promotions passent les épreuves dans les mêmes amphithéâtres … »

Emma, tu es étudiante en médecine à Clermont, as-tu été mobilisée pendant la crise sanitaire ?

Non je n’ai pas été mobilisée, étant en 3ème année de médecine, nous avons seulement pu nous porter volontaires, et l’hôpital n’a pas eu besoin de nous. Une partie des étudiants en années supérieures étaient en stage à l’hôpital durant cette période, et ceux pour lesquels les stages ont été annulés faute de rendez-vous ont pu être mobilisés, pour certains, sur la base du volontariat !

Dans ton université, le doyen souhaite vous faire revenir pour des partiels en présentiel, c’est bien ça ?

Tout à fait, pour les 2ème et 3ème années de médecine, les partiels étaient initialement prévus du 11 au 13 Mai, avec la situation actuelle le doyen et l’administration de notre faculté ont décidé de les reporter, mais de les maintenir en présentiel, du 17 au 19 Juin, nous avons même une épreuve d’anglais 10 jours plus tard. Les étudiants en 4 et 5ème années passeront également leurs partiels en présentiel, les 15 et 16 Juin, au lieu de mi-mai.

Nous ne sommes pas les seuls concernés, car aux mêmes dates les étudiants en maïeutique passeront également leurs épreuves à la Faculté de Médecine et de Pharmacie, et les étudiants en pharmacie une semaine après nous. En faisant quelques calculs, nous sommes 200 par promotion en médecine, 30 en maïeutique, nous allons donc être plus de 400 étudiants les 15 et 16 Juin, et 400 autres du 17 au 19 Juin à se retrouver à la Faculté de Médecine et de Pharmacie, sachant que nous devrons pour certains manger sur place, étant donné le temps laissé entre les épreuves du matin et celles de l’après-midi.

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Quel est ton sentiment sur cette démarche d’organiser des partiels en présentiel et de regrouper des étudiants malgré les recommandations du conseil scientifique ?

Avant tout de l’incompréhension, je ne comprends pas en quoi passer ces épreuves en présentiel est absolument nécessaire ! Des dispositifs ont été mis en place dans toutes les autres facultés de la ville, il est possible de passer certaines épreuves en ligne, d’autant plus que nous avons une majorité d’épreuves sous forme de QCM, donc cela serait totalement possible ! Voici la réponse que nous avons eue : « les services informatiques de l’Université ne peuvent pas assurer des connexions parfaites pour l’ensemble des étudiants de la promotion pendant la durée des examens, compte tenu du nombre d’étudiants qui se connecteraient et du nombre d’épreuves ». Tout ce qui est impossible pour nous a l’air de l’être pour les étudiants des autres facultés !

D’autant plus que nous avons passé une unique épreuve en ligne (encore une fois incompréhension, pourquoi ne pas avoir attendu les épreuves finales pour la passer ?) et que tout s’est bien passé, sans problème de connexion à ma connaissance !

Il y a aussi une part d’inquiétude, on nous certifie que les mesures barrières seront appliquées, mais en nous disant d’ores et déjà qu’aucun masque ne sera à notre disposition et qu’on doit se les fournir de nous-même. Nous serons répartis dans trois amphithéâtres au lieu de deux, et du gel hydro-alcoolique nous sera fourni, mais comment garantir que nous ne prendrons aucun risque ? Des surveillants vont devoir distribuer nos copies, vérifier nos identités avec nos cartes, nous changeons de place à chaque épreuve, et plusieurs promotions passent les épreuves dans les mêmes amphithéâtres …

Les études de médecine en vidéo avec l’ANEMF :

Réformes et études de médecine : PASS, LAS, Externat, ECN et Internat

N’est-ce pas étonnant que les étudiants en médecine soient regroupés ? Alors qu’ils ont été mobilisés pour certains et potentiellement en contact ?

C’est le mot oui, c’est étonnant et les étudiants ne comprennent pas cette décision. Personnellement je n’ai pas été mobilisée et n’ai pas travaillé au contact de patients, mais certains l’ont été, d’autres ont été confinés totalement comme je l’ai été, et nous allons être « mélangés » durant plusieurs jours pour passer ces épreuves.

De plus, certains étudiants venant d’autres régions sont rentrés chez eux durant le confinement, et vont devoir faire parfois plus de 100km (et donc se procurer une attestation dédiée) pour pouvoir venir passer les partiels à Clermont-Ferrand. Ces étudiants peuvent venir de régions où le virus circule moins, ou plus, et vont donc prendre ou faire prendre des risques aux autres. Le nombre de déplacements étant limités sur la France, je ne trouve pas normal qu’il faille faire déplacer ces étudiants uniquement pour des partiels qui auraient pu être faits en ligne !

Dans ton université, quel est l’avis d’autres étudiants ? Des élus ? Du président de l’Université ?

L’avis des étudiants est globalement similaire au mien je pense, certains se disent très inquiets de la situation, qu’ils ne pensent pas du tout sous contrôle ! Nous sommes surtout déçus que l’on ne nous ait pas demandé notre avis en fait !

Les élus nous soutiennent, font remonter nos questionnements, ils ont dès le début proposé des situations alternatives au doyen (passer les partiels sur SIDES notamment, une plateforme d’entrainement au concours de 6ème année, qui est capable d’accueillir des milliers d’étudiants simultanément) mais malheureusement en vain. Le président de l’Université a apparemment accepté la demande exceptionnelle du doyen de réaliser des épreuves en présentiel, alors que c’est en contradiction avec les nouvelles modalités d’examen qui ont été votées par la CFVU (Commission de la Formation et de la Vie Universitaire) locale ! Encore une incompréhension …

Que demandez-vous à l’université ?

Je pense qu’il est malheureusement trop tard pour demander quoi que ce soit, mais nous voulons leur faire comprendre que nous ne sommes pas satisfaits par cette décision, que nous ne la comprenons pas ! Nous avons attendu un long moment avant d’avoir les dates « définitives » de nos examens, nous sommes dans l’attente et dans l’indécision depuis le début, c’est une situation très anxiogène.

Si la situation sanitaire venait à évoluer de façon négative, ces décisions seraient bien évidemment revues, mais nous aurions préféré que notre faculté fasse comme les autres, et nous propose des épreuves en ligne.

Avez-vous des contacts avec d’autres instances de l’université de Clermont-Ferrand ?

Comme dit précédemment, les autres facultés de Clermont-Ferrand semblent toutes faire passer des épreuves en ligne, voire même annuler des épreuves pour certaines !

Un dernier mot ?

Pour terminer, je tiens encore une fois à partager mon incompréhension et ma déception face à cette décision de maintenir des partiels en présentiel, qui selon moi aurait pu largement être évitée, nous faisant prendre beaucoup moins de risques !

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