Dénonçant « l’oubli de trop » après le Ségur de la Santé, étudiantes et étudiants sages-femmes ont décidé de se mobiliser pour leur avenir. En effet, à l’occasion d’un entretien pour le JDD le 17 mai dernier, le ministre de la Santé annonçait le lancement d’un « Ségur de la santé » du nom de l’avenue où se trouve le ministère de la Santé et des Solidarités. Cette grande réunion multilatérale des partenaires sociaux du monde de la santé, qui s’est tenue à partir du 25 mai, a finalement abouti à un accord signé ce 13 juillet. Pourtant présenté comme une « grande avancée » par le gouvernement, cet accord a fait de nombreux déçus, au premier rang desquels figurent les sages-femmes. Afin de comprendre leurs revendications, nous avons interrogé Fanny Toussaint, Présidente de l’Association Nationale des Etudiant.es.s Sages-Femmes (ANESF).

 

Par Solène Trévidic
Temps de lecture : 5 min

 

Le 17 mai dernier, le ministre de la Santé annonçait le lancement d’un « Ségur de la santé ». Un accord a été signé le 13 juillet dernier, que pensez-vous de celui-ci ?

Les accords du Ségur de la santé sont très éloignés de ce qui avait été promis et annoncé. Tout le monde devait être entendu et un immense plan de restructuration devait avoir lieu. Comme on aurait pu s’y attendre suite à des concertations de 50 jours seulement, les attentes des acteur.ice.s du monde de la santé ont été déçues et les changements, devant être hors du commun, sont finalement peu radicaux. Nous n’avons pas pu signer ces accords car les sages-femmes ont été exclues des négociations, et n’ont pas été conviées à la signature, contrairement aux médecins, comme à notre habitude.

 

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Le 17 juillet 2020, l’ordre des sages-femmes a publié une lettre ouverte à ce sujet, qu’en pensez-vous ? Y avez-vous participé ?

Nous n’avons pas participé à la rédaction de cette lettre ouverte mais nous l’avons relayée. Effectivement, elle est conforme à la communication que nous avons réalisée jusqu’à présent, sur twitter notamment.

 

 

Dans cette lettre ouverte il est écrit que les sages-femmes sont une profession médicale sous un statut hybride dans la fonction publique hospitalière, pouvez-vous expliciter ?

Sage-femme est une profession médicale, d’après les articles L4151-1 à L4152-9 du Code de la Santé Publique, au même titre que les médecins et chirurgiens-dentistes. Cependant, contrairement à eux.elles, nous avons un statut de sage-femme hospitalières et non de praticien.ne.s hospitalier.e.s, dénigrant une fois encore notre métier et ne reconnaissant pas nos compétences et responsabilités à leur juste valeur.

 

Cette concertation devait reposer sur 4 piliers afin de permettre d’aborder toutes les questions qui pouvaient toucher au milieu médical. Comment expliquer l’absence de mesures concernant votre profession ? Pourquoi les syndicats professionnels de sage femmes n’ont pu participer aux négociations ?

La santé est très souvent « médecin-centré ». Nos syndicats professionnels n’ont pas participé aux concertations car ils.elles n’y ont pas été invité.e.s. Au-delà de ça, les sages-femmes n’ont pas été entendu.e.s malgré de multiples relances auprès du ministère. La reconnaissance et l’intérêt porté au métier de sage-femme est égal à la reconnaissance et l’intérêt porté à la santé des femmes. C’est-à-dire presque nul. Notre métier est, depuis toujours, marqué par le sexisme du gouvernement. Sinon, comment expliquer de telles difficultés, rencontrées par notre profession très majoritairement féminine ? Manque de reconnaissance qui n’est rencontré par aucune autre profession médicale ou pharmaceutique.

 

Etes-vous satisfaits des mesures qui ont été prises dans le cadre des trois autres piliers ?

De manière générale, le Ségur de la santé promettait une refonte du système de santé. Les mesures prises sont très loin d’être ambitieuses. Nous ne sommes absolument pas satisfait.e.s de ce que nous appelons maintenant, une vaste mascarade.

 

A ce jour, pouvez-vous nous dire quelles mesures ont été prises concernant votre profession ?

Concernant notre formation, nous avons obtenu une revalorisation des rémunérations en stage à hauteur de 260€ bruts en DFASMa1 et 320€ bruts en DFASMa2. C’est une victoire, bien que ces montants restent inférieurs aux 3€90 de l’heure, montant minimal de la rémunération d’un.e stagiaire dans l’enseignement supérieur, initialement demandé par nos fédérations. Cette revalorisation concerne les étudiant.e.s hospitalier.e.s.

 

 

Concernant notre profession, une revalorisation de 183€ supplémentaires a été annoncée pour les sages-femmes, profession médicale, 5 ans d’études, travaillant les nuits et les week-ends, et passant par la première année commune aux études de santé, c’est-à-dire moins qu’un.e infirmièr.e à l’hôpital (+218€/mois), qu’un.e médecin.e (+256€/mois), qu’un.e interne (+265€/mois), qu’un.e aide-soignant.e en EHPAD (+218€/mois). C’est absolument scandaleux et tous.tes les sages-femmes de France sont actuellement révolté.e.s. Aucune autre mesure concrète n’a été prise.

 

Quelles mesures (supplémentaire) revendiquez-vous aujourd’hui ?

Nous revendiquons un statut de maître de stage pour les sages-femmes, la bi-appartenance à l’instar des médecin.e.s, chirurgien.ne.s-dentistes, pharmacien.ne.s, la revue des décrets de périnatalité, le passage de notre statut de sages-femmes des hôpitaux à praticien.ne.s hospitalier.e.s,…Le chemin est encore long et semé d’embuches avant d’avoir une reconnaissance adéquate.

 

Pensez-vous que votre profession est, de façon générale, trop souvent oubliée ?

Au-delà d’être oubliée, elle n’est pas respectée. Une fois encore, liée en partie au sexisme. Nous savons que le gouvernement connaît le champ de compétences des sages-femmes, ainsi que leur statut de profession médicale (en atteste la rémunération des étudiant.e.s). Cet « oubli » est volontaire. Notre profession manque surtout de reconnaissance.

 

Une consultation en ligne a été lancée du 8 au 22 juin, y avez-vous participé ? Pensez-vous que les professionnels de votre secteur y ont suffisamment participé ?

Nous y avons participé mais nous pensons que tout ceci est très démagogique et que l’inutilité de ces concertations a été démontrée par les accords signés.

 

Parallèlement au «Ségur de la Santé», pour réfléchir à l’hôpital de demain et à sa place dans le système de santé, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a lancé, sur la plate-forme Make.org, une grande consultation citoyenne, qu’avez-vous à dire aux étudiants qui nous lisent ?

Nous invitons tous.tes les citoyen.ne.s Français.e.s à se mobiliser et à lutter aux côtés des sages-femmes, garant.e.s de la sécurité et de la prise en charge respectueuse des patient.e.s dans le domaine de la gynécologie, de l’obstétrique, de la périnatalité…

 

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Sage Femme

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